Ce que le Pilates dit (aussi) du monde du travail
Ce que nos corps peuvent apprendre à nos organisations
Cet article s’inspire de la très stimulante newsletter de Laetitia Vitaud, Nouveau Départ, et plus précisément de son édition intitulée « Pilates : 7 leçons sur l’avenir du travail ». Je vous recommande chaudement sa lecture. En tant que praticienne convaincue des disciplines exigeantes et douces – Pilates, course à pied, yoga infrarouge – j’ai été frappée par la pertinence du parallèle qu’elle établit entre pratiques corporelles et transformations du travail.
Car ce que nous faisons à nos corps – le rythme, la pression, la récupération, l’exigence – reflète souvent la manière dont nous construisons nos environnements professionnels.
Voici ce que le Pilates, cette discipline née dans les années 1920 et revenue au cœur des pratiques contemporaines, peut nous apprendre sur le travail d’aujourd’hui et surtout, celui que nous voulons construire demain.
Travailler les muscles profonds
Le Pilates n’est pas un sport de démonstration. On n’y cherche pas la performance spectaculaire, mais la solidité, l’ancrage, le travail des muscles invisibles. Il renforce ce qui tient debout sur le long terme.
Dans les entreprises, il est tentant de valoriser ce qui se voit : les résultats immédiats, les présentations brillantes, les “quick wins”. Mais les fondations d’un collectif sain reposent sur des dynamiques moins visibles : la qualité de l’écoute, la régulation émotionnelle, la coopération informelle.
Une étude de la Harvard Business Review (2023) souligne que les équipes les plus “émotionnellement intelligentes” traversent mieux les périodes de transformation. Et pourtant, ces compétences sont rarement valorisées dans les systèmes d’évaluation.
Repenser la soutenabilité du travail
Joseph Pilates avait conçu sa méthode pour des malades alités. Son ambition : permettre au plus grand nombre de bouger avec fluidité et longévité. Rien de spectaculaire, tout dans la régularité, la posture, la respiration. Une philosophie qui, selon Laetitia Vitaud, “épouse le vieillissement des corps” au lieu de le nier.
Le parallèle est frappant. Comment prétendre faire travailler les gens jusqu’à 67 ans dans des environnements qui restent conçus pour des corps jeunes, masculins, sans problèmes de santé ni charges invisibles ?
Travailler longtemps suppose un travail réinventé : ergonomique, respectueux, fluide. Cela implique de sortir du dogme de la productivité maximale, et d’inventer un autre contrat : un équilibre viable entre l’effort et la récupération.
Se recentrer sur l’essentiel
Le Pilates est un retour aux fondamentaux. Il ne promet ni spiritualité, ni miracle, ni révolution esthétique. Il propose un travail sobre, précis, centré sur l’essentiel.
C’est peut-être l’enseignement le plus précieux pour nos organisations. Trop souvent, le “travail qui fait bien” masque le “travail qui va bien”. Derrière les totems (sens, engagement, fun, épanouissement), les attentes sont simples : un salaire correct, un emploi stable, du respect mutuel, des horaires tenables.
Dans une enquête de Gallup (2024), les principaux critères de satisfaction au travail restent les mêmes depuis 10 ans : la reconnaissance, la clarté des objectifs, la possibilité de progresser, la qualité de la relation avec son manager. Rien de nouveau, mais toujours aussi fondamental.
Le miroir des inégalités
Enfin, comme le note Vitaud, le Pilates est un sport très féminisé. Il agit parfois comme un espace refuge pour celles et ceux qui ne se retrouvent pas dans les normes dominantes de performance ou de compétition. Ce n’est pas anodin.
Car le monde du travail reste, lui aussi, inégal dans sa manière de considérer les corps. Entre les injonctions à la disponibilité permanente, les réunions tardives, les “afterworks obligatoires”, ou les temps pleins déguisés en 80%, il reste du chemin pour penser un travail véritablement inclusif.
Cela suppose d’interroger nos normes, nos symboles, nos pratiques. Et de donner une vraie place à la pluralité des façons de contribuer – et d’exister – dans le collectif.
À retenir
Le Pilates nous dit quelque chose de notre époque. Une époque qui aspire à plus de stabilité que de spectacle, plus de fluidité que d’urgence, plus de durée que de démonstration. Appliquer cette philosophie au travail, ce n’est pas céder à une mode de plus. C’est peut-être, au contraire, renouer avec l’essentiel.
Chez Humanside, nous accompagnons les organisations qui veulent renforcer leur socle plutôt que multiplier les effets de manche. Pour construire des environnements durables, sobres, humains.
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