Faut-il former ou transformer ? (et pourquoi les RH doivent arrêter de jouer aux logisticiens)
Salle réservée, feuilles de présence imprimées, buffet commandé… et si on annulait tout ?
Former ou transformer, telle est la question provoquante que devraient se poser nos services RH surmenés. Pendant trop longtemps, « gérer la formation » s’est apparenté à une mission logistique : planifier des sessions, cocher des cases, utiliser le budget DIF/CPF.
Mais à l’ère des bouleversements permanents, ce rôle purement organisateur ne suffit plus.
Former pour former n’est pas une fin en soi – l’enjeu réel, c’est de transformer les compétences, les comportements et même la culture d’entreprise. Dans cet article, on explore pourquoi les RH gagneraient à troquer leur casquette de gestionnaire de formation pour celle de chef d’orchestre de la transformation, afin d’accompagner au mieux l’évolution des collaborateurs et de l’organisation.
Les RH, bien plus que des planificateurs de formation
Commençons par un constat : la fonction RH s’est complexifiée, tiraillée entre des obligations administratives accrues et des attentes stratégiques toujours plus fortes. En matière de formation, cela se traduit souvent par une dérive administrative. Dossier après dossier, les RH passent un temps fou à gérer les aspects techniques, réglementaires et logistiques de la formation : recenser les besoins, enregistrer des heures, vérifier les éligibilités, organiser des sessions… Au point que le cœur stratégique du sujet peut se perdre de vue. La gestion de la formation est probablement le volet RH le plus chronophage administrativement, avec la multiplication des contraintes légales (entretiens pro obligatoires, etc.)skillup.co.
Résultat, les RH jouent souvent les pompiers : éteindre les feux (conflits d’agenda, annulations, conformité) plutôt que d’allumer la flamme du développement des talents.
Cette surchauffe logistique a un coût : chaque heure passée à monter des sessions est une heure de moins pour piloter des projets à forte valeur ajoutée, comme le développement des compétences critiques, l’accompagnement du changement ou la réflexion sur la marque employeurskillup.co. En caricaturant à peine, le responsable formation devient un agent de planning alors qu’il pourrait être un stratège de l’évolution des compétences. Il est temps d’arrêter de jouer aux « logisticiens de la formation » et de reprendre de la hauteur. Les RH ne sont pas là juste pour cocher des cases formation sur un LMS ou remplir des tableaux Excel de suivi, mais pour s’assurer que ces formations débouchent sur du concret, sur une montée en compétence effective au service de la stratégie de l’entreprise.
Le risque, si l’on reste coincés dans un rôle d’assembleur de formations, c’est de passer à côté de l’essentiel : former, oui, mais pour quel impact ? Trop d’organisations empilent les parcours sans mesurer la transformation réelle. Or, un DRH devrait pouvoir dire : « Grâce à nos actions, nos collaborateurs font les choses différemment, l’entreprise a grandi dans telle direction. » Ce qui nous amène au point crucial : former ne suffit pas, il faut transformer. Et cela nécessite de repenser le rôle RH.
Former pour transformer : un changement de paradigme
Former ou transformer ? La réponse pourrait être : les deux, mon capitaine ! Bien sûr qu’il faut continuer de former les collaborateurs, mais l’objectif final doit être la transformation à la fois de l’individu et de l’organisation. Former pour former – cocher la case « tous nos managers ont eu leur 14h de formation annuelle » – n’a pas de sens si rien ne change sur le terrain. L’enjeu est de lier intimement la formation aux projets de transformation de l’entreprise. Autrement dit, chaque action de formation devrait s’inscrire dans une vision de changement : développer une compétence X parce qu’elle permettra d’évoluer vers un nouveau modèle d’affaires, former sur le savoir-être Y parce qu’on veut faire bouger la culture interne, etc.
Cela implique un véritable alignement stratégique. Plutôt que de traiter la formation comme un catalogue à distribuer, on part des défis de l’entreprise : transformation digitale, amélioration de l’expérience client, agilité organisationnelle, innovation, internationalisation… À partir de là, on déduit les compétences à acquérir ou renforcer pour relever ces défis. La formation devient un levier de transformation. Par exemple, si la boîte vise une culture plus collaborative, inutile de lancer seulement des modules e-learning théoriques sur « le travail d’équipe » : il faut créer des workshops collaboratifs, du coaching terrain et peut-être même ajuster les process internes pour valoriser le collectif au quotidien. En ce sens, les RH doivent piloter la transformation en adaptant les processus de formation pour qu’ils produisent du changement réel, et pas seulement des attestations de fin de stage.
Ce changement de paradigme se reflète dans l’évolution de l’entreprise vers une organisation apprenante. On ne forme plus à la marge, on intègre l’apprentissage dans la stratégie et la culture. D’ailleurs, 44 % des entreprises ont déjà adopté de nouvelles approches (e-learning, formations hybrides…) pour moderniser le développement des compétences. Mais la vraie transformation ne consiste pas qu’à digitaliser la formation, elle est surtout dans le sens qu’on y met : générer de la valeur, accompagner les évolutions internes, anticiper les compétences de demain. La formation transformante est dynamique, agile, en ajustement constant aux besoins changeants de l’organisation. Elle fait le lien entre plan de formation et plan de développement de l’entreprise.
Du logisticien au stratège : le nouveau rôle des RH
Pour opérer ce basculement, les RH doivent accepter de lâcher du lest opérationnel et de déléguer tout ce qui peut l’être (digitalisation administrative, externalisation partielle, automatisation des tâches simples) afin de dégager du temps et du cerveau pour la stratégie. L’idée n’est pas d’envoyer valser l’organisation – il faut toujours un minimum de rigueur – mais de réorienter l’énergie RH vers la création de valeur. Concrètement, le responsable formation de demain ressemble plus à un chef de projet transformation qu’à un organisateur de stages. Il va : analyser l’impact attendu des formations, impliquer les managers dans la définition des objectifs (et pas seulement pour signer les feuilles de présence), suivre les indicateurs post-formation (changement de comportements, performances améliorées), et ajuster en continu. C’est un pilotage proactif bien plus qu’une gestion passive.
Cette approche requiert aussi de nouvelles compétences… pour les RH eux-mêmes ! Moins de saisie Excel, plus de facilitation, de marketing interne (pour « vendre » en interne les programmes de transformation), de conduite du changement. Les RH deviennent les pilotes de la transformation en alignant le développement des talents sur la stratégie de l’entreprise. Ils agissent comme des architectes qui conçoivent des parcours d’apprentissage innovants, transverses, en phase avec les évolutions du business. Cela peut passer par créer une vraie culture d’apprentissage en interne (mentorat, communautés de pratique, partage spontané), ou par innover dans les formats (formations flash, immersives, projets apprenants…).
Un point crucial : impliquer les managers et le top management. Un RH visionnaire saura mobiliser le COMEX pour qu’il sponsorise activement la montée en compétences (une entreprise apprenante, ça se construit aussi par le haut). Il saura aussi embarquer les managers comme relais : ceux-ci ne doivent plus voir la formation comme « une affaire de RH » mais comme leur outil pour faire grandir leurs équipes. Finies les classes vides parce que « le manager n’a pas pu libérer X de son service » – le manager doit au contraire co-construire le plan de développement de son collaborateur. Autrement dit, RH et managers co-pilotes de la transformation humaine de l’entreprise.
En arrêtant de jouer les office managers de la formation, la fonction RH retrouvera son rôle de catalyseur du changement. Et c’est là que réside sa vraie valeur ajoutée, reconnue par la direction générale : contribuer directement à la performance future en façonnant l’organisation de demain, plutôt qu’en gérant uniquement le présent. Former ou transformer ? La réponse est claire désormais : former pour transformer !
Idée à mettre en pratique : Libérez vos RH des tâches logistiques à faible valeur ajoutée pendant un trimestre (par exemple en automatisant l’envoi des convocations et relances). Profitez-en pour lancer un « Comité de Transformation des Compétences » réunissant RH, managers opérationnels et direction, chargé de lier étroitement formation et stratégie. Une de ses premières missions pourrait être d’identifier 1 projet clé de l’entreprise (augmentation de la satisfaction client, lancement d’une nouvelle offre, etc.) et de bâtir un plan de développement des compétences ad hoc pour soutenir ce projet. Ce faisant, vos RH exerceront concrètement leur rôle de partenaires stratégiques, au-delà de la logistique.
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